Barrières géantes, caméras intelligentes : les élus se mobilisent pour protéger les espaces publics.Mais sans assumer le rôle de l’État.
Mieux protéger leurs habitants sans pour autant effectuer le travail de l’État. Le défi devient de plus en plus dur pour les élus locaux, à la lueur de la polémique sur le remplacement des policiers nationaux par des agents municipaux sur la promenade des Anglais à Nice, le 14 juillet. En fin de semaine dernière, le président de l’Association des maires de France (AMF), François Baroin, a envoyé une lettre au ministre de l’Intérieur pour exprimer la crainte des maires « d’ un transfert de responsabilité de l’Etat vers les maires dans le domaine de la sécurité ».
Initiatives municipales pour renforcer la sécurité
Pour autant, ils prennent de plus en plus d’initiatives dans ce sens. Fin 2014, à Nantes, une voiture avait fondu sur la foule tuant une personne et en blessant neuf autres sur une zone pourtant piétonnière à l’année. Le chauffard avait franchi les plots de sécurité rétractables derrière un autre véhicule autorisé, selon la technique du petit train.
« Nous avons redéfini les mesures de sécurité », explique Lionel Edmond, directeur de la tranquillité publique à la ville de Nantes. Au-delà du renforcement de la présence humaine, la ville a placé des pots de fleurs géants enchaînés et d’épaisses poutres. La solution de lourds rochers, comme ceux protégeant les terrains contre les intrusions de véhicules, est envisagée avec en toile de fond un doublement des effectifs Sentinelle, des renforts de CRS et réservistes supplémentaires.
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A Rennes, lors des dernières manifestations, pour bloquer le centre-ville, police et CRS ont utilisé des « barres ponts », ensembles en grillage ou Plexiglas installés pour limiter le nombre des fonctionnaires statiques afin de sécuriser une rue.
D’autres, comme Toulouse, misent sur les caméras. Le parc de la Ville rose est passé en deux ans de 21 à 150 avec un objectif de 330 à 350 fin 2017. Un nouveau PC de sécurité a été installé où se relaient 35 opérateurs. Un investissement de 1,8 million d’euros en 2015 et l’ensemble du programme dépassera 3 millions. « Les caméras aident à arrêter des gens dans la délinquance quotidienne, assure Oliver Arsac, adjoint à la sécurité. Elles ont permis une vingtaine de fois d’entraîner l’intervention rapide de la police et des services de secours. »
A Beauvais, la maire, Caroline Cayeux, a commencé après les attentats de novembre à sécuriser les bâtiments municipaux, rappelé que le stationnement devant les écoles devait être évité et diffusé auprès des agents municipaux des consignes sur les gestes décisifs à adopter en cas d’alerte. « Nous leur avons aussi demandé de détecter les comportements radicaux afin d’introduire une forme de civisme dans la mission de service public », ajoute le responsable de la sécurité de ville.
Aider l’État, à condition
Les différentes associations d’élus locaux acceptent aujourd’hui de prêter main-forte à l’État, sous condition. Gaël Perdriau, maire de Saint-Etienne et coprésident de la commission sécurité de France urbaine, a ainsi récemment demandé au gouvernement de disposer du nom des habitants fichés « S » et de la possibilité de faire des contrôles d’identité. Il espère aussi un durcissement des conditions de domiciliation (ouverture d’une boîte postale), récemment assouplies par un décret.
Faut-il aller plus loin et réfléchir à une nouvelle configuration des espaces urbains ? Président de l’association Ville et banlieue, le maire de la Seyne-sur-Mer, Marc Vuillemot, reconnaît que les caméras servent à élucider la petite délinquance. Mais pour lui, il faut redoubler d’effort contre la ghettoïsation des quartiers et la paupérisation des centres-villes.
Article vu sur :
– www.lesechos.fr – du 22 juillet 2016