Face aux rumeurs, aux espoirs et aux besoins d’un secteur malmené depuis plusieurs années, réponse aux questions fondamentales.
7 000 postes au total
Selon Vincent Peillon, ministre de l’Education, « 14.000 suppressions de postes… ont été décidées par mon prédécesseur pour cette rentrée »… Au total, ce sont « près de 80.000 postes » (77 000 exactement) qui auront été supprimés entre 2007 et 2012.
Face à cette situation, l’objectif affiché par le ministre s’élève maintenant à 7000 postes dès la rentrée prochaine, pour répondre aux besoins les plus criants (60 000 postes sur le quinquennat).
1 000 postes pour le primaire, 6 000 pour le secondaire
Le ministre l’a dit partout : toutes les académies seront concernées par cette mesure.
Mais c’est dans le primaire, où 1 000 postes seront créés, que le ministre veut agir en priorité, parce que dit-il, « depuis 20, voire 30 ans, c’est le primaire qui a été le moins bien traité… Or, c’est au CP, au CE1 que tout se joue, qu’on apprend à lire, écrire et compter ». Sur ce point, l’association avait demandé plus de moyens pour les moments-clés que constituent la petite-enfance, la maternelle et le primaire.
Pourtant, le primaire affiche de grandes inégalités : « Dans le primaire, il y a des endroits plus défavorisés que d’autres : des départements où il y a plus d’élèves et moins de professeurs, et donc des taux d’encadrement plus faibles. Les affectations se feront en priorité dans « une dizaine de départements, des territoires ruraux aujourd’hui en difficulté, pour des élèves eux-mêmes en difficulté ayant besoin d’être accompagnés ».
Dans le détail, l’académie de Versailles obtient 100 postes et celle de Créteil 80 postes. Les autres académies les mieux dotées sont les académies d’Aix-Marseille, Bordeaux, Grenoble, Lyon et Rennes qui obtiennent chacune 65 postes. Le Languedoc-Roussillon gagne 35 postes tandis que les autres reçoivent entre 5 (Martinique, Guadeloupe, Corse) et 50 postes supplémentaires. 10 emplois sont réservés pour Mayotte.
Dans le secondaire, pour faire face aux 21 000 élèves supplémentaires attendus au collège, il est envisagé de créer quelque 6 000 postes pour la rentrée 2012.
Tout d’abord 220 professeurs certifiés, recrutés sur les lites complémentaires des candidats à l’agrégation 2012. Puis l’équivalent de 1 500 postes dégagés sous la forme de décharge horaire pour formation accordée aux nouveaux promus, dont l’année de stage avait été supprimée par l’ancien gouvernement. 500 « assistants chargés de la prévention et de la sécurité », qui seront formés et entreront en fonction d’ici décembre dans les établissements les plus soumis aux faits de violence. 2 000 assistants d’éducation, contractuels (souvent étudiants) chargés de surveiller les élèves, d’aider aux devoirs ou encore d’accompagner les plus en difficulté. Enfin, 1 500 postes supplémentaires d’auxiliaires de vie scolaire (AVS), chargés de l’accompagnement des élèves handicapés.
Dès la rentrée prochaine
Cela a été suffisamment souligné et commenté : Vincent Peillon a été l’un des premiers ministres à s’exprimer publiquement, au point de brûler les étapes aux yeux de certains en annonçant des mesures non validées par le gouvernement ou la concertation promise.
Quoi qu’on en pense, le ministre affiche sa volonté de s’inscrire dans une politique de moyen/long terme mais d’entrer en action le plus rapidement possible pour envoyer au pays – syndicats, enseignants, parents d’élèves, citoyens confondus – un signal fort.
Conclusion : les nouveaux postes sont annoncés « dès septembre prochain », envisagés comme « le début d’un redressement, presque une mesure de réparation ».
Des critères objectifs de difficulté et de besoin
Conformément au discours du président de la République, Vincent Peillon dit vouloir agir pour « corriger les injustices des suppressions de postes », au nom d’un principe de réparation, de compensation, une logique de retour ou de remise à égalité.
Sur Radio France la semaine dernière et dans l’Est républicain, le ministre a évoqué 4 critères d’affectation : le taux d’encadrement (nombre d’enseignants par élève), le taux de réussite, les catégories socioprofessionnelles, et « une attention particulière aux zones rurales ».
Allusion à la situation des villes de banlieue, « la difficulté sociale et scolaire, de façon à renforcer les académies qui y sont le plus confrontées », a également été retenue.
Sur la méthode, le processus choisi, deux maîtres mots semblent guider son action. Concertation d’abord : « nous ouvrirons la concertation dès lundi [avec les syndicats], pour définir des critères objectifs et justes, et affecter ces postes, là où ils sont le plus nécessaires ».
Et proximité : « Une enveloppe de postes sera attribuée à chaque académie, à charge pour elle de la gérer en concertation, au plus proche du terrain », a expliqué le ministre.
Ville et Banlieue sera vigilant
Bien sûr, l’Association se félicite de ces premières mesures de réparation. Mais tout n’est pas réglé pour autant.
Si les territoires ruraux touchés par les fermetures de classe doivent retrouver des conditions d’éducation décentes, l’équité territoriale concerne d’abord les banlieues, où se superposent aux enjeux de réussite éducative des enjeux majeurs d’équité sociale et d’intégration
D’autre part, à la faveur de la grande réforme annoncée, une meilleure articulation doit se mettre en place entre l’Education nationale et le ministère de la Ville pour que les quartiers identifiés comme les plus défavorisés bénéficient rapidement d’une priorité d’action de la part de la rue de Grenelle.
Enfin, la rénovation pédagogique ne devra pas être sacrifiée à la simple re-création de postes, tant il est vrai que nos établissements de banlieue sont les premiers touchés par le décrochage scolaire.
Satisfactions et inquiétudes syndicales
Face aux mesures annoncées, le syndicat FO s’inquiète du devenir des 15 000 contrats aidés AVS-EVS (emploi vie scolaire, auxiliaire de vie scolaire), dont le contrat vient à échéance entre juin et septembre, et dont rien n’assure qu’ils seront tous réemployés… Et du remplacement devant les élèves des enseignants stagiaires déchargés pour 3 heures de formation hebdomadaire.
De son coté, le SNUipp-FSU (primaire) insiste sur la nécessité de « réimplanter les postes de Rased » (aide aux élèves en difficulté).
Enfin, l’UNSA et le SNES veulent voir reposée « la question de l’attractivité du métier d’enseignant » et des solutions esquissées très vite pour endiguer la crise des vocations.