Trois réunions sur les conseils citoyens se sont tenues au cours de ce mois de juin au ministère de la ville. Ville & Banlieue, seule représentante présente des associations d’élus, a fait valoir le point des élus des villes populaires en politique de la ville. Ces rencontres – des groupes de travail des 9 et 23 juin, et comité national de suivi des conseils citoyens de ce 27 juin- ont donné lieu à des échanges de vue très productifs entre les partenaires intéressés à la mise en oeuvre des conseils citoyens : ministère et CGET, sous-préfets à la ville, délégués du préfet, centres de ressources de la politique de la ville, professionnels de l’IRDSU, Comité national de liaison des régies de quartiers, centres sociaux, représentants associatifs, coordination citoyenne « Pas sans nous », etc…
Ci-après une synthèse rapide des orientations retenues par consensus en préfiguration de la circulaire d’application à paraître au coeur de l’été. Une première version de la rédaction du texte devra être achevée fin juillet pour une entrée en vigueur début septembre.
1- Le rôle des conseils citoyens. Plusieurs voix se sont élevées au cours de ces réunions pour regretter que, malgré le texte de loi et le référentiel national, la fonction des conseils citoyens reste floue pour de nombreux acteurs, à commencer par ceux des collectivités et des conseils eux-mêmes. Il est ainsi jugé important de « ne pas spécialiser les conseils citoyens sur l’animation des quartiers et l’organisation de moments de convivialité de proximité et de rappeler leur fonction politique, de co-construction de la politique de la ville et des politiques publiques qui lui sont associées ». Dans cet esprit, les conseils citoyens ont donc vocation à participer aux instances de la politique de la ville (COPIL et groupes de travail thématiques…), à discuter une à deux fois par an de l’avancée et de la programmation du contrat de ville, à délibérer sur ces décisions avec les autres partenaires..
2- Le portage de projets. Sans qu’il soit question de l’interdire ou de le décourager, il est convenu que les conseils citoyens n’ont pas pour fonction première de porter directement eux-mêmes des projets en lieu et place des autres acteurs du quartier, notamment associatifs, mais plutôt d’encourager et d’appuyer cette dynamique en offrant un lieu au débat public citoyen dans les quartiers.
3- Portage de projets en lien avec le Fonds de participation des habitants (FPH). La majorité des acteurs présents plaident pour que les FPH continuent d’appuyer les petits projets d’initiative locale ; et ils reconnaissent qu’à ce titre, les FPH ne peuvent servir de supports à l’action régulière des conseils citoyens. Inversement, les conseils citoyens n’ont pas vocation à en devenir animateurs ou bénéficiaires et devraient se borner à participer au comité de sélection des actions associatives ou citoyennes locales présentées.
4- Formation. Le consensus se fait autour de l’idée que les conseils citoyens étaient porteurs d’une nouvelle approche politique de la politique de la ville, exigeant un changement culturel de l’ensemble des parties prenantes. D’où la nécessité de co-formation des différents acteurs devant apprendre à dialoguer et à travailler ensemble : membres habitants et non habitants des conseils, services de l’État et des collectivités, élus locaux. A ce propos, il est demandé que les conseils citoyens participent activement au cahier des charges des formations commandées à leur intention, pour y faire valoir leurs attentes et leurs besoins prioritaires.
5- Animation. Sur ce point également, il est convenu que le choix de l’animateur doit répondre aux attentes du conseil citoyen. Plusieurs participants insistent sur le fait que le recours à un tiers neutre ne doit pas empêcher le conseil de s’emparer de cette fonction, ni faire obstacle à une montée en compétences de ses membres.
6- Moyens. Le débat montre que les conseils citoyens font face à « deux types de besoins »: d’une part, ils doivent pouvoir disposer de moyens de fonctionnement ordinaires pour lesquels une enveloppe de 2 000 € pourrait être bientôt proposée par l’État ; d’autre part, il leur faut disposer de moyens d’animation ou d’activité bien plus importants dans le cadre du contrat de ville, crédits apportés par ses signataires coresponsables sur le BOP 147 ou d’autres lignes de droit commun. Enfin, il est décidé de réfléchir à une forme de défraiement ou d’indemnisation des membres des conseils citoyens, salariés ou non, en emploi ou non, en reconnaissance de leur implication au service du bien commun.
7- Le portage juridique. S’il est maintes fois souligné au cours des discussions que le format associatif représente une commodité pour le conseil citoyen et ses partenaires, autorisés par ce statut à lui verser des subventions, il faut admettre que ce statut ne peut lui être imposé et que le conseil doit lui-même rester co-décideur de sa forme juridique. Enfin, il est proposé que le conseil puisse être porté par une association ad hoc sans devenir lui-même association, afin de ne créer pas d’inégalité entre ceux qui deviendraient membres du bureau et les autres.
8- Composition, constitution et renouvellement du conseil citoyen. Le recours aux seules listes électorales est jugé insuffisant pour assurer la bonne représentation du quartier, notamment en raison de la présence dans les QPV de nombreuses populations issues de pays hors de l’Union européenne ou de personnes hébergées. Il est donc recommandé de s’appuyer sur 2 ou 3 listes complémentaires : listes des bailleurs ou de la CAF, signataires des contrats de ville, listes de la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP) servant à la collecte de la taxe d’habitation. De plus, il est jugé assez problématique et dommageable pour sa représentativité et sa légitimité qu’un conseil citoyen puisse reposer sur l’activité exclusive de 4 ou 6 personnes ; c’est pourquoi on préconise de constituer une liste de suppléants assez fournie. Enfin, plusieurs participants demandent, avec Ville & Banlieue, que le conseil puisse travailler de façon ouverte et constructive, en interaction avec le quartier comme avec les autres instances participatives de la ville et de l‘agglomération.
9- Co-construction et co-évaluation. Ces mots sont de l’avis de tous, les concept-clés de la démarche. D’où la nécessité d’associer le conseil citoyen à tous les sujets décisifs pour l’avenir du quartier, sans exclusive, par exemple celui de l’usage de l’exonération de TFPB consentie au bailleur. De l’associer aussi, annuellement et à mi-parcours, à l’évaluation de la programmation et des actions du contrat de ville.
10- Contre-pouvoir ? Enfin une discussion s’est engagée sur le pouvoir du conseil citoyen. Certains ont parlé de « contre-pouvoir », y voyant une force d’équilibre salutaire par rapport au « pouvoir électoral représentatif » ; d’autres y voyant le risque d’une instrumentalisation politicienne des conseils citoyens ou un pouvoir systématiquement contestataire de la municipalité. Dans ce débat, Ville & Banlieue souhaite qu’on abandonne ce terme – comme celui de « pouvoir alternatif » proposé par la coordination Pas sans nous – au profit d’expressions comme « pouvoir d’interpellation » et « pouvoir de proposition » citoyens.