Les dispositions législatives créant la compétence GEMAPI (Gestion des Milieux Aquatiques et Prévention des Inondations) entreront en vigueur à compter du mois de janvier 2018. Les collectivités volontaires peuvent prendre dès à présent cette compétence par anticipation. C’est le choix fait par les membres de l’Etablissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI) Arles-Camargue-Crau-Montagnette (ACCM) dont le conseil communautaire du 26 septembre 2017 a approuvé l’instauration de la taxe GEMAPI sur son territoire.
Pourquoi ?
La majorité des communes du territoire de la communauté d’agglomération sont situées le long du Rhône et de la mer. Ainsi ce territoire est-il fortement et régulièrement exposé aux crues du Rhône et aux submersions marines.
La communauté d’agglomération ACCM possède depuis août 2016 une compétence GEMAPI partielle (celle relative à la « Prévention des Inondations ») dans le cadre du Plan Rhône. Par un ensemble d’arrêtés préfectoraux, c’est la compétence GEMAPI dans son ensemble qui a été attribuée par anticipation à la communauté d’agglomération ACCM au milieu de l’année 2017.
La communauté d’agglomération se substitue dès lors aux communes membres d’Arles, Tarascon et Saintes-Maries-de-la-Mer en la matière et les représente au sein des structures qui gèrent, historiquement, la question de l’eau sur ce territoire : depuis 2016, la communauté d’agglomération est donc intégrée aux membres du SYMADREM (Syndicat Mixte Interrégional d’Aménagement des Digues du Delta du Rhône et de la Mer. C’est la structure qui assure l’entretien et la mise en œuvre des digues de protection du Rhône et de la Mer.)
Dans un deuxième temps, à compter du 1er janvier 2018, la communauté d’agglomération se substituera également à ses communes membres au sein du SI2VB (Syndicat Intercommunal du Vigueirat et de la Vallée des Baux), du Parc naturel régional de Camargue et du SIHTBLV (Syndicat Intercommunal pour l’aménagement hydraulique du bassin de Tarascon – Barbentane et pour l’entretien de la Lône de Vallabrègues). Il s’agit de favoriser la solidarité territoriale face à des risques communs et de réduire le morcellement actuel de cette compétence tout en préparant le désengagement progressif de l’Etat en matière de financement.
Comment ?
Pour financer l’exercice de cette compétence, la communauté d’agglomération ACCM qui est un EPCI-FP (Etablissement Publics de Coopération Intercommunale à Fiscalité Propre) pouvait faire supporter cette dépense par son budget général ; mobiliser le mécanisme de redevance pour service rendu ou encore mettre en place la « taxe GEMAPI » exclusivement dévolue aux dépenses de fonctionnement et d’investissement qui lui sont relatives. Celle-ci est plafonnée à 40€/an/habitant et recouvrée par l’administration fiscale. La communauté d’agglomération a fait le choix de la taxe.
Pour 2018, l’exercice de la compétence GEMAPI nécessitera sur le territoire de l’EPCI ACCM une inscription budgétaire de 2,1 millions d’euros. Les 0,9 millions d’euros de fonctionnement seront financés par la retenue sur l’attribution de compensation (prise sur les cotisations des différentes structures auxquelles appartient la communauté d’agglomération ACCM et qui exercent aujourd’hui différentes compétences qui relèveront demain de la seule GEMAPI) tandis que les 1,2 millions d’euros d’investissement seront financés par cette taxe. Taxe dont les bénéficiaires de logements sociaux seront exonérés (la communauté d’agglomération ACCM compte quatre quartiers prioritaires “politique de la ville” aux populations fragiles).
Quel bilan ?
Autrefois facultative et morcelée entre différents échelons territoriaux, la question de la GEMAPI est désormais clarifiée pour les communes membres de la communauté d’agglomération ACCM, qui lui ont totalement transféré cette compétence.
En décembre 2003, le territoire de la communauté d’agglomération ACCM a été profondément endommagé par les inondations qui ont entraîné un milliard d’euros de dommages. Les communes membres accueillent donc positivement cette nouvelle compétence et ont fait le choix d’une prise de compétence par anticipation afin qu’au 1er janvier 2018 tous les acteurs de la GEMAPI soient opérationnels sur ce territoire fortement soumis aux risques d’inondations.
Demain, la communauté d’agglomération ACCM envisage de porter sur son territoire la démarche ReVITeR (Réduction de la Vulnérabilité aux Inondations des Territoires Rhodaniens) renforçant ainsi son inscription dans une démarche plus globale de la réduction du risque aquatique dans le cadre du Plan Rhône.
Le projet en photos
Interview de Monsieur Bernard Dupond, Vice Président délégué à la prévention des risques de la GEMAPI et de la gestion des déchets ménagers et assimilés à la communauté d’agglomération ACCM et Maire de la commune de Boulbon
Pourquoi la communauté d’agglomération ACCM a-t-elle fait le choix de la prise de compétence par anticipation assortie d’une mise en place de la taxe GEMAPI ?
Pour la communauté, le gros de la GEMAPI c’est le « PI ». Aujourd’hui le SYMADREM (Syndicat Mixte Interrégional d’Aménagement des Digues du Delta du Rhône et de la Mer) prévoit 400 millions d’euros de travaux dont 5 % seront autofinancés. Ces grands travaux seront financés par le biais d’un seul mécanisme budgétaire. Une communauté d’agglomération qui se retrouve aujourd’hui en compétence pourrait en effet se retrouver en difficulté financière si de tels travaux étaient supportés sur son seul budget général. C’est ce que les communes membres de la communauté d’agglomération ACCM veulent éviter.
Que représente pour vous l’horizon 2020 en matière de GEMAPI ?
Selon les lois MAPTAM et NOTRe, il est prévu qu’en 2020 les communautés d’agglomérations se substituent aux acteurs historiques et à leur clause de compétence générale. Il s’agit ici essentiellement du Département et de la Région.
Mais les modalités d’application risquent de changer et pour éviter de mettre en difficulté le bloc communal, l’échéance sera sans doute repoussée à 2030. En effet, l’objectif de 2020 est par exemple difficilement tenable sur un territoire comme le nôtre, interrégional qui plus est (l’ACCM est à cheval entre Occitanie et PACA.)
Nous passerions de 5 à 20 % d’autofinancement, ce qui feraient exploser les cotisations si les échelons, notamment étatiques, se désengagent totalement d’ici 2020 et le coût de fonctionnement se verrait quadruplé car si on maintien le principe actuel, les EPCI comme la nôtre porteront seules le coût de la compétence GEMAPI.
Comment la GEMAPI s’intègre-t-elle dans une gestion globale du cycle de l’eau par le bloc communal ?
On s’achemine vers une compétence globale et intégrée de la gestion de l’eau par les EPCI. C’est intéressant, dans le cadre de la GEMAPI d’avoir un acteur qui, a terme, portera la globalité de cette gestion : progressivement on va y intégrer le petit cycle de l’eau et le grand cycle de l’eau.
Il ne s’agit que du début de la prise de compétence complète de la gestion de l’eau par le bloc communal. Nous étions très avancés dans la compétence liée au petit cycle de l’eau (assainissement), aujourd’hui le grand cycle de l’eau est en chantier et nous nous acheminons vers la SOCLE (Stratégie d’Organisation des Compétences Locales de l’Eau) coordonnée par l’Etat à l’échelle de chaque grand bassin hydrographique.
Nous déterminons actuellement qui fait quoi et d’ici 2018, nous devrions avoir optimisé la gouvernance de l’eau sur le territoire de la communauté d’agglomération ACCM.
Pour notre territoire aux problématiques très spécifiques, nous portons l’enjeu de l’une des plus grosses opérations françaises de sécurisation (qui s’étend de Vallabrègue à la mer, sur plusieurs dizaines de kilomètres). Cette opération justifie la mise en place de la taxe pour supporter son coût très élevé : 1 200 000 € cette année et 2 000 000 millions voire plus pour l’an prochain. Nous avons institué la taxe seulement pour couvrir notre participation aux frais d’investissement.
Comment avez-vous élaboré ce financement ?
Les communes membres de différents syndicats avaient déjà des frais afférents. Lorsque la compétence GEMAPI a été récupérée par la communauté d’agglomération, nous avons bien sûr faits fait jouer l’attribution de compensation pour équilibrer.
Nous avons également décidé que nous étions sur deux sources financières : celle des charges fixes des communes et que l’on récupère sur l’attribution de compensation et celle de la taxe GEMAPI (pour nos dépenses d’investissement.)
En 2018, le budget général de la communauté d’agglomération ne sera pas affecté par la GEMAPI. Les 2 100 000 € que représentent toutes les dépenses identifiées seront financées par l’attribution de compensation à hauteur de 900 000 € et la future taxe GEMAPI financera lest 1 200 000 € restants.
Comment la population a-t-elle accueilli l’arrivée de cette taxe ?
Chez nous le risque d’inondation est entretenu par la survenue régulière des phénomènes. La crue de 2003, avec ses 5000 sinistrés, n’est pas si lointaine, nous avons cette culture du risque d’inondation. Objectivement, notre territoire peut être violemment impacté par les crues du Rhône, ainsi la population a-t-elle plutôt bien accueilli la mise en place de cette taxe.
- EPCI : ACCM (Arles Camargue Crau Montagnette)
- Département : Bouches-du-Rhône
- Région : PACA
- Population : 83 561 habitants
- Président : Claude Vulpian (conseiller municipal Saint-Martin-de-Crau)
- Site internet : www.agglo-accm.fr
- 2 100 000 € seront consacrés à la GEMAPI sur ce territoire
- La taxe GEMAPI est plafonnée par l’Etat à 40 € /an par habitant
- Le dossier GEMAPI de la Gazette des communes
- Vademecum GEMAPI du Ministère de la Transition écologique et solidaire
- La taxe GEMAPI, article paru dans Les Echos – du 09 octobre 2017